Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/357

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Criant : "Où sont donc ces putains ?
Où sont ces démons intestins ? "
Mais les cagnes, la chose faite,
Avaient sonné pour la retraite,
Feignant de s’en aller pisser,
Et cherchèrent, pour se musser,
Qui quelque rocher, qui quelque antre,
Donnant et la déesse au diantre,
Et la Junon qui l’envoyait,
Qui peut-être alors en riait.
Elles n’en faisaient pas de même.
Comme leur rage fut extrême,
Le remords du prince offensé
Les troubla plus qu’on n’eût pensé.
Junon n’étant plus dedans elles,
Qui de ces pauvres demoiselles
Avait rendu les esprits fous,
Elles fourrèrent dans des trous
Leurs têtes faibles les premières,
Ne montrant rien que les derrières,
Qui sont, comme on sait, moins honteux.
Que les visages vergogneux.
Mais à des vaisseaux pleins de braise,
De quoi sert une syndérèse,
Puisqu’on n’y fait rien avec l’eau ?
Tout y rebrûle de plus beau,
Et, malgré l’eau, les flammes vives
S’attachent aux pièces massives ;
La flamme gagne pas à pas
Des endroits hauts, les endroits bas ;
L’air s’obscurcit de la fumée
Qu’engendre l’étoupe allumée ;
Les flancs des nefs suent un peu,
Puis aussitôt sont vus en feu,
Qui, par une fureur extrême,
Introduit son ennemi même,
Et donne une entrée à la mer
Qui fait les vaisseaux abîmer.
Aeneas, à cette misère,
S’arrache le poil, désespère