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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/398

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Dans la forêt du bois abattre.
Il en abattit plus que quatre,
Et chacun dit à haute voix.
 « O le grand abatteur de bois ! »
On fit maints fagots et bourrées,
Et bûches longues et carrées,
Sans oublier quelques cotrets,
Pour en faire un bûcher après,
Qui brûlât le corps de Misène,
Afin que son âme, sans peine,
Jouît, en vertu du bûcher,
Des privilèges de l’Enfer
Après cette cérémonie,
Aeneas, en grande agonie,
Poussant mille soupirs ardents,
Disait entre ses belles dents :
"Si ce rameau, cette merveille,
Se faisait voir à la pareille
En quelque endroit de la forêt,
Puisque si véritable elle est,
La vieille dame, que Misène
S’est trouvé mort dessus l’arène,
Je me tiendrais plus fortuné
Qu’un homme veuf ou qu’un aîné."
Comme il parlait de cette sorte,
Deux pigeons, que la plume porte,
Se vinrent à lui présenter ;
De joie il se mit à sauter,
Car il les connut à leur mine
Pour être à sa mère Cyprine.
Lors il se mit à les hucher
Afin de les faire approcher,
Et, de plus, le bon sire Enée
Tira de vesce une poignée
D’une poche de boucassin
Qu’il portait à l’endroit du sein,
Chose qui passe la croyance ;
Mais telle était sa prévoyance
Que jamais sans vesce il n’allait,
Dont le bon seigneur régalait