Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/452

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Mais j’oubliais, quant à sa race,
Qu’il vient de droit fil d’Assarace.
O le brave fils de putain,
Que cet auteur du nom Romain !
Il fera mentir le proverbe.
La peste, qu’il sera superbe
De voir les gens de lui sortis
Faire enrager grands et petits !
Ainsi la vieille Bérécynte,
Grave comme une femme enceinte,
Vénérable comme un prélat
Qui prétend au cardinalat,
Par deux maîtres lions tirée,
Sur sa tête une tour carrée
Qui lui fait ployer le chignon,
Ses mains sèches sur le rognon,
Sur un char propre à faire entrée
Par la phrygienne contrée,
Va partout se glorifiant
Seule, à soi-même se riant
D’avoir, par sa vertu féconde,
Mis tant de déités au monde,
Plus de cent dieux, de compte fait,
Qu’elle a tous nourris de son lait.
O la succulente nourrice !
Mais j’aperçois de la milice
Le protomagister César :
Ah ! considérez-le bien, car
Le drôle, avec sa tête chauve,
Sera, pour le noir et le fauve,
Le plus fin chasseur des humains.
Il fera bouquer les Romains,
Eux qui font enrager les autres ;
Il sera la gloire des vôtres,
Et puis dans le ciel aura part,
Mais à beaux grands coups de poignard.
Ah ! le voici, le grand Auguste,
Vaillant, courtois, beau, sage et juste !
Dieu nous le devait, sur ma foi ;
En esprit déjà je le vois