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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/56

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Le reste dépendra de vous.
Ne vous contraignez pas pour nous,
Et gardez-vous bien de nous faire
Une aumône non volontaire ;
Vous seriez sotte en cramoisi,
Si vous nous la donniez ainsi.
Les Grecs appellent Hespérie
Une terre du ciel chérie ;
Les gens y sont mauvais garçons,
Et les champs en toutes façons
Donnent à ceux qui les cultivent
Tous les biens dont les hommes vivent ;
Ce pays, aux temps anciens,
Fut celui des Enotriens ;
Depuis, cette terre jolie
D’Italus s’appelle Italie.
S’il faut vous franchement parler,
C’est là que nous pensions aller,
Quand Orion porte-tempête,
Un astre sujet à sa tête,
Nous a pris en aversion
Sans en avoir occasion,
Nous a, par un vent de galerne,
Secoués comme gens qu’on berne,
Et dans de grands vilains rochers
A bien fait jurer nos nochers.
Nos navires sont dispersées,
Ces quinze ou seize ramassées,
Qui viennent ici d’aborder,
Où Dieu les veuille bien garder,
Ne sont que la moindre partie
De la flotte bien assortie
D’armes et de provisions,
Que, lorsque les Grecs champions
Nous prirent tous à la pipée,
Nous avons en hâte équipée.
Qu’ils savaient bien ce qu’ils faisaient,
Les vents, alors qui nous poussaient
Vers ces infortunés rivages !
Ils nous portaient vers les sauvages ;
Nous secondâmes