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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/61

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Et des beaux champs saturniens,
Soit que, des bords Ericiens,
Acestes, le compatriote,
Attire les cœurs de la flotte,
Vous serez de nous escortés,
Vous serez de nous assistés
De munitions et de vivres.
J’ai quinze ou seize mille livres,
Ne craignez point d’en disposer.
Certes, si sans me refuser,
Vous voulez accepter l’asile
Que je vous offre dans ma ville,
Je ne ferai pas des Troyens
Moins de cas que des Tyriens,
Et plût à Dieu que votre Prince
Fût en cette même province,
Par le même orage jeté !
Je ferais faire, en vérité,
Pour une si bonne fortune ;
Un beau sacrifice à Neptune
Oh ! que bien il s’en trouverait
Celui qui me l’amènerait !
Je veux le long de cette rade
Envoyer des batteurs d’estrade,
Pour voir s’il ne s’est point niché
En quelque petit port caché,
Ou bien en quelque forêt sombre,
Pour être fraîchement à l’ombre."
A ces discours non attendus,
Ils rirent comme des perdus,
Les bons Troyens, et, ravis d’aise,
Dansèrent autour de sa chaise,
Se mirent à crier : Vivat !
Frappèrent à l’envi du plat
De la droite contre la gauche,
Ne respirèrent que débauche,
Et reçurent des Tyriens
Traitement de concitoyens.
Dieu sait s’ils eurent grande hâte,
Enée et son fidèle Achate,