Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/19

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l’homme noir, de l’adresse, de l’esprit, et une profondeur de raisonnement merveilleuse, tandis qu’on s’opiniâtre d’un autre côté à voir en lui un être stupide et sauvage que l’indulgence des plus savans veut bien mettre quelque peu au-dessus d’un orang-outan ! Voilà qu’un nègre nouveau, véritable idiot qui a mis plus de deux ans à se débarbariser, se trouve tout juste deux ans plus tard à l’intelligence d’un habile calculateur et la sagacité d’un raisonneur très-subtil. N’en doit-on pas conclure du moins qu’on a tort de ne classer un animal susceptible de pareils progrès que comme « intermédiaire entre le singe et l’homme[1] ? Je comprends mal, du reste, pourquoi l’esclave de M. F. P., si fin, si prévoyant, emploie son argent à acheter une négresse inconnue, venant de la côte, pour en faire sa femme, tandis qu’il peut en choisir un si facilement sur l’habitation, sans dépenser un sou, et je comprends encore moins l’avantage qu’il pourra trouver à la faire travailler à côté de lui au profit de son maître. Ces observations nous conduisent à croire que la bonne foi de l’écrivain que nous citons a été trompée ; car il est matériellement impossible qu’un nègre nouveau, et surtout un nègre de terre, puisse amasser dix-huit cents francs dans l’espace de cinq années. Il ne faut pas oublier que, d’après

  1. J. J. Virey, Dictionnaire des sciences médicales.