Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/52

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enclins à la corruption lorsqu’ils ne sont soumis à aucune bonne influence.

Le génie du mal plane sur la société.

Il n’est que trop vrai qu’on a vu des esclaves empoisonner leurs camarades et leurs enfans même, dans l’unique pensée de nuire à leur maître, et certes, ce ne sera pas moi qui justifierai ces forfaits ; mais je le dis, en vérité parce que telle est ma profonde conviction, on ne peut moralement pas en accuser les nègres. Non, plus on les laisse dans l’ignorance, plus on les dégrade, moins ils en sont réellement coupables. Ces crimes affreux doivent retomber sur la tête des tyrans qui les poussent à de pareilles extrémités. Quels que soient leurs défauts et leurs vices, ce ne sont pas les leurs, ce sont les défauts et les vices de leurs maîtres. Il ne faut qu’un peu d’énergie dans l’âme pour comprendre « ce que c’est qu’une nature ignorante et flétrie, ce que c’est qu’un malheureux insulté, méprisé, avili, qui paye les affronts de l’esclavage par des appétits féroces et d’horribles instincts. »

Quelle poignante position que celle d’être obligé de travailler sa vie entière sans autre récompense qu’une misérable nourriture, condamné à tout souffrir, tout, sans jamais se plaindre, victime impassible, pour qui se défendre serait un crime ! — À l’esclave personne ne doit rien, il n’a rien ; il ne