Page:Schœlcher - Le procès de Marie-Galante, 1851.djvu/50

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que c’était préparer l’extermination de la race blanche ! Autrefois, la parole, la volonté du planteur ne se discutaient pas, elles s’imposaient ; certains colons n’ont pu l’oublier. La preuve c’est qu’à cette époque M. Bayle-Mouillard, ce procureur général embarqué par M. Fiéron, exposait en ces termes les prêterions exorbitantes de certains habitants sucriers :

« D’anciens maîtres, demandant une contrainte impossible, rêvent je ne sais quel système de travail forcé, et s’emportent contre le magistrat qui refuse de remplacer le fouet du commandeur par la verge de la justice déshonorée ! » En de telles conjonctures, comment les relations qui existaient entre M. Alonzo et ses anciens frères de servitude n’auraient-elles pas appelé sur lui la vengeance de ceux qui voulaient remplacer le fouet du commandeur par la verge de la justice déshonorée ? M. Bayle-Mouillard, chef de la justice à la Guadeloupe, a été banni pour avoir résisté aux entraînements de l’oligarchie coloniale ; M. Alonzo ne devait il pas succomber ?

Nous n’analyserons pas les autres griefs qui lui sont imputés par le ministère public. Quelle force, en effet, ajoute à l’accusation sa participation à la création du journal le Progrès ? « Meneur politique, Alonzo recevait toutes les communications. En voulez-vous une preuve ? Un journal est fondé à la Pointe-à-Pitre, le matériel est venu de Paris : » (Oh ! oh ! voilà qui est suspect, un matériel de journal venu de Paris !) ; « mais il faut un cautionnement. Le comité de la Pointe écrit à qui ? À Alonzo, qui est nommé président d’une commission dont Maurice Sébastien fait partie. Des quêtes s’organisent, et le cautionnement est trouvé ! » Assurément cela paraîtra très-grave à un homme qui n’aime pas la presse. Mais depuis quand, sauf pour M. Rabou, la qualité d’actionnaire d’une feuille indépendante implique-t-elle une complicité quelconque dans des incendies et des dévastations ? M. Alonzo avait de l’influence ! qui le nie ? ses convictions politiques rattachaient au parti qui portait dans les élections MM. Perrinon et Schœlcher ! il ne s’en cache pas. Mais qui oserait lui faire un crime d’opinions aussi chevaleresquement exprimées que celles-ci :