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ports nécessaires des hommes réunis en communauté, que les conditions de la vie sociale sont la mesure des attributions de l’État, et enfin que la conscience et, par suite, la vie religieuse sont en dehors de ces conditions, parce qu’elles ne sont pas du nombre des choses que l’homme puisse mettre en commun, compromettre, aliéner au profit de la vie sociale.

Plus tard Vinet distingua plus nettement encore ce côté de la grande question, et il l’a abordé plus directement dans son Essai sur la manifestation et dans l’écrit Du socialisme. Toutefois la Lettre à un ami, aussi bien que le Mémoire, nous le montre déjà instinctivement éloigné de la notion moderne ou socialiste de l’État. Il répugne à l’idée d’un État absorbant en soi toutes les fonctions de la société, réunissant toutes ses tendances, envahissant toutes ses voies, se chargeant de toute sa mission et de toutes ses destinées. Sa notion c’est la notion libérale, notion négative plutôt que positive et qui tend à réduire au minimum l’action gouvernementale ; l’État est, pour lui, un milieu plutôt qu’une action, une condition et non un but. D’autres veulent dépouiller l’individu au profit de l’État, Vinet ne voulait laisser à l’État que ce qui lui revient par droit de nécessité, et comme condition même de la vie en société. Peut-être, est-ce là, en effet, le seul point sur lequel les partisans de la liberté des cultes et de l’incompétence de l’État en matière ecclésiastique puissent insister avec succès auprès du public. Les raisons tirées de l’intérêt de la religion toucheront peu l’homme politique, les motifs tirés de l’intérêt bien entendu de