Page:Schlegel - Œuvres écrites en français, t. 1, éd. Böcking, 1846.djvu/270

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imagination mobile, dans le passage subit d’une douleur accablante au comble de la joie, peut-on s’étonner qu’elles aient été hors d’état d’observer exactement tous les détails, et qu’une certaine confusion ait régné dans le rapport qu’elles en firent aux Onze assemblés ?

Saint Matthieu seul parle d’un tremblement de terre ; de la descente visible d’un ange du haut des cieux qui fit rouler la pierre loin du sépulcre ; enfin d’un poste de soldats romains, frappé de stupeur. Luc seul aussi fait spectatrices de cette grande scène les deux femmes qui, selon lui, étaient arrivées sur les lieux, Marie-Madelaine et l’autre Marie.

Il est singulier que l’évangile de saint Matthieu, qu’on prend pour le plus ancien, abonde plus en circonstances miraculeuses qui auraient signalé la résurrection, que les trois évangiles suivants. Car d’ordinaire les objets favoris d’une tradition populaire, soit faits, soit fictions, grandissent en raison de la distance du temps, et sont plus fermement crus à mesure qu’ils deviennent plus incroyables. Ici l’inverse est arrivé. En revanche, l’évangéliste ne parle point de la merveille des merveilles, de l’ascension ; et son texte ne fournit pas le moindre indice qu’il ait eu connaissance de ce dogme futur.

Quant à la seconde supposition, cette thèse : « tel homme mort a ressuscité, » implique contradiction. Car la mort est précisément la cessation absolue et irrévocable des fonctions vitales : c’est là sa définition. Or. si les fonctions vitales reprennent leur cours, c’est une preuve que la cessation n’était que temporaire, et que, par conséquent, la mort n’était point réelle. Dans l’espèce humaine la suspension de l’activité des organes par l’effet d’une