Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

péché originel. En ce qui concerne la Vierge, ce dogme n’a été proclamé qu’en 1870. Mais l’idée en était très ancienne, et il est extrêmement probable que Schleiermacher a eu connaissance de cette disposition au sein du catholicisme.

Ajoutons que, accomplissant par l’exemple de sa vie et de sa mort la volonté du Dieu créateur de l’homme, incomplètement réalisée en Adam, on peut dire en un certain sens que le Christ ainsi conçu est consubstantiel à Dieu, sans avoir à admettre que le Fils a de tout temps coexisté avec le Père et le Saint-Esprit. L’interprétation que Schleiermacher donne des rapports entre Père, Fils et Saint-Esprit, lui permet de continuer à n’accorder qu’un intérêt spéculatif au dogme de la Trinité (§§ 170-172, II, 496-513).

Cette divinité, ce surnaturel, peuvent très bien se concevoir sans qu’on ait à admettre que le Christ soit né de la Vierge Marie et des œuvres miraculeuses du Saint-Esprit. Fidèle à son principe immuable, à l’esprit qui animait déjà ses Discours, à la volonté de ne fonder la foi que sur le sentiment intime et sur l’expérience personnelle vécue, c’est l’action exercée par le Christ sur les âmes qui atteste, aux yeux de Schleiermacher, sa divinité. Quant aux récits de Matthieu et de Luc sur sa naissance surnaturelle, il ne lui importe guère qu’on les admette ou les rejette (La Foi chrétienne II, 61-66).

La résurrection du Christ, son ascension, font l’objet d’observations et de raisonnements tout semblables (II, 77-78 et 80-88).

Le théologien élimine donc des dogmes chrétiens ce qu’ils comportent, dans la mission du Christ, du fait de sa naissance et de ce qui suit sa mort, de plus choquant pour la raison, de matériellement surnaturel si l’on peut risquer cette expression, ce qui arrête le plus ceux pour lesquels, comme pour le romantique lui-même, il n’y a d’action divine admissible que dans le cadre des lois données par Dieu à la nature.

À l’égard des miracles attribués au Christ par les Évangiles, l’attitude du critique est, cela va sans dire, toute semblable. Il n’en discute pas l’authenticité. Il les déclare inutiles pour notre foi. Les miracles n’agissent en effet que par l’impression qu’ils font sur ceux qui en sont témoins. Les récits historiques qu’on en lit ne peuvent pas avoir la