Page:Schleiermacher - Discours sur la religion, trad. Rouge, 1944.djvu/78

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tant au sujet des communautés, associations ou sociétés religieuses, des Églises.

C’est sur ce besoin, très général, de communion avec ses semblables et avec l’humanité, de recherche en commun, de travail collectif, contrôlé par des échanges réciproques de sentiments et d’idées, que Schleiermacher fonde l’existence nécessaires des communautés religieuses, des Églises. Ce qui est vrai de l’ensemble des sentiments normaux doit l’être à plus forte raison du sentiment religieux, si profond, si général, et auquel les êtres humains attachent une importance exceptionnelle. Plus donc que tout autre, le sentiment religieux doit être sociable et social, c’est le double sens qu’il faut semble-t-il donner au mot gesellig dans l’emploi qu’en fait ici Schleiermacher, en particulier dans cette déclaration de la page 177 : « Du moment que la religion existe, elle doit nécessairement être aussi gesellig, cela résulte non seulement de la nature de l’homme mais encore très particulièrement de sa nature à elle ».

Les Églises sont donc des institutions nécessaires, et le théologien va étudier sous bien des aspects les conditions que ces institutions communautaires devraient remplir pour pouvoir servir de cadre au sentiment religieux, qui, nous le savons, est d’après lui le principe même, l’essence de la religion, et un fait essentiellement individuel. Le romantique ne se lasse pas de rappeler ce double caractère parce que c’est là ce qu’il y a de nouveau, d’original et de fondamental, dans sa conception de la religion. Il va presque jusqu’à dire : autant de religions que d’individus religieux. Mais il dit aussi : la religion est nécessairement un fait social, et il parle en défenseur de l’institution des Églises. Il semble qu’on doive voir là non une contradiction, mais une preuve du sens, chez ce romantique, de la complexité du réel.

Les Églises, il les montre naissant du besoin qu’ont les croyants de se réunir, pour s’exalter individuellement et mutuellement, et se contrôler réciproquement dans leur sentiment religieux.

Ces exaltations et ce contrôle ne pourraient-ils pas résulter de libres entretiens comme ceux qui suffisent à la vie de tant d’autres sentiments ? Non, répond Schleiermacher