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quis. À une existence au milieu de vaincus encore frémissants, il fallait une forte organisation sociale. Les éléments s’en trouvaient d’ailleurs déjà ab antiquo dans les coutumes des pasteurs védiques. Sans doute, on ne saurait parler dès l’abord de quatre castes comme le fait un brâhmana, un rituel du Yajur-Veda[1], mais cependant trois classes sociales existaient pour sûr en principe. Aux prêtres revenait naturellement, sinon la première place du moins une place spéciale, car ils parlaient à la divinité et étaient ses interprètes. Et comme cela demandait des cérémonies, et que ces cérémonies aboutissaient à un rituel de plus en plus compliqué, les fonctions sacerdotales ne tardèrent guère à se concentrer dans une corporation toute spéciale et isolée du reste de la nation.

Quant à la caste des Xatrija (sic), l’auteur croit pouvoir prouver, par la philologie comparative, que les Aryens ont apporté avec eux dans l’Inde une forme d’autorité civile et sociale qui n’était déjà plus celle de l’état patriarcal. Les pasteurs envahisseurs avaient déjà des princes, viçpati, qui, s’ils n’étaient pas des despotes ou des tyrans au sens péjoratif de ces mots, étaient cependant les maîtres du peuple et ses juges, raj. La fonction de juge parut bientôt la plus importante du chef, et alors le viçpati appelé raja qui régit ou gouverne, devint rex ou roi. Le principat social apparaît dans le Véda revêtu d’un caractère divin, en ce que c’est par l’assistance des dieux seulement que le prince s’y montre capable de juger et de diriger le peuple. Cependant, comme il ne pouvait tout faire par lui-même, surtout lorsque des clans en nombre considérable s’étaient, dans les plaines de l’Hindoustan, groupés en nations, son autorité se trouvait partagée, à des degrés divers, par les chefs de ces clans. Devenus ainsi les fondés de pouvoir du roi, ses plénipotentiaires, ces chefs furent nommés d’après cette fonction (kshatra) qui les séparait du peuple et les constituait en feudataires, la caste des kshatriyas. Compris dans une seule et même division, les rajas et les kshatriyas ne pouvaient prendre rang qu’après les prêtres, parce que pour être reconnus pleinement, les gouvernants avaient besoin de la consécration religieuse. Cette obligation donnait forcément au roi et à ses aides une sorte d’infériorité à l’égard des brâhmanes.

Pour ce qui est de la caste des vaiçyas, elle se trouva toute faite dès que les deux premières étaient constituées ou seulement en voie de se former. C’est la masse des Aryas, tous ceux qui avaient soin des troupeaux et aussi des champs, qu’embrassait cette troisième classe. Par la suite, quand les Aryens furent entrés en pleine possession des riches campagnes du Jamdudvîpa, l’élève du bétail et la culture du sol imposèrent au peuple une troisième occupation, celle du commerce.

Mais ces travaux exigeaient des aides ; il fallait aux Viç, devenus opulents, des valets, des serfs. Où les prendre si ce n’est parmi ceux qui

  1. Catvâro vai varnâh. (Çatapathabrâhmana, V, 5, 4, 9 ; p. 474, éd. Weber.)