Page:Schoebel - Le Rituel brahmanique du respect social.djvu/32

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œuvres cérémonielles enjointes ou réglées par la çruti et la smriti[1] ; la science, vidyâ, est la connaissance approfondie, tattvajnânam, du sens du véda, vedârtha. Le texte n’emploie que le terme uttaram subséquent, le commentaire supplée le terme correspondant pûrvamât précédent, de sorte qu’il faut lire : Celle qui est subséquente est plus importante, c’est-à-dire meilleure, çreshtham, que celle qui lui précédé. Ainsi, la parenté vaut mieux que la richesse, l’âge mieux que la parenté, les œuvres religieuses mieux que l’âge, et la science l’emporte sur tout.

Ce classement fait assurément honneur à l’esprit des Aryas. De même que l’antiquité grecque et latine célébrait le bonheur de celui qui possède la science :

Felix qui potuit rerum cognoscere causas[2],

de même l’antiquité indienne plaçait la béatitude du sage,

  1. Çruti révélation, de çru entendre, ce qui a été entendu. Nous avons déjà dit plus haut que ce terme s’applique aux mantras, prières en forme de chant ou d’hymnes, et aux brâhmanas qui contiennent l’interprétation religieuse des mantras, ce qu’on appelle la théologie dogmatique. Les brâhmanas sont très-probablement les écrits en prose les plus anciens de l’Inde ; mais il ne faut pas songer ici à notre prose à nous, mais à la prose précédemment définie des sûtras, c’est-à-dire excessivement brève, concise et obscure. — smriti tradition, de smri, se souvenir, est ce qui est conservé par la mémoire, ce qu’on apprend oralement, et, sous ce rapport, ce sont proprement les sûtras, écrits de l’âge postérieur et faits dans le but de venir en aide à la mémoire, qui constituent la smriti. Mais ces sûtras ne sont pas sacrés au même titre que les mantras et les brâhmanas ; aussi ne font-ils pas partie intégrante du Véda ; ils en forment les appendices, les Vedângas. On comprend, d’après cela, que la çruti ait toujours été plus en vénération que la smriti. (Cf. Weber, Ind. Stud., II, 183). Ce qui est étonnant, c’est que ce mot smriti ne se trouve pas dans Panini, qui est cependant postérieur à Alexandre. Serait-ce une preuve que la smriti, comme doctrine traditionnelle, est d’élaboration et d’application moderne ? Cela est embarrassant à décider. Ce qui est certain, c’est que la vraie tradition, la tradition primitive et l’historique, était comprise dans la çruti (Cf. Roth, Nirukta, p. XIX).
  2. Virg. Georg., II, v. 480.