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Page:Schopenhauer - Écrivains et Style, 1905, trad. Dietrich.djvu/129

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Wilhelm Schlegel, qui a été depuis mon étoile polaire :

Lisez attentivement les anciens, les véritables anciens :
Ce que les modernes en disent ne signifie pas grand’chose[1].

Oh ! comme une tête ordinaire est donc semblable à une autre ! Comme elles sont toutes coulées dans le même moule ! Comme chacune, dans le même cas, pense la même chose, et rien d’autre ! Ajoutez à cela leurs basses vues personnelles. Et un public stupide lit l’indigne bavardage de tels drôles, uniquement parce qu’il sort tout chaud de l’impression, tandis qu’il laisse les œuvres des grands esprits dormir sur les planches des bibliothèques !

On a peine à croire à la folie et à l’absurdité du public qui néglige les plus nobles et les plus rares esprits en tout genre de toutes les époques et de tous les pays, pour lire les élucubrations quotidiennes des cerveaux ordinaires, qui éclosent chaque année en foule innombrable, comme les mouches ; et cela, parce qu’elles ont été imprimées aujourd’hui et sont encore humides de la presse. Il vaudrait mieux que ces productions restassent là abandonnées et méprisées dès le jour de leur naissance, comme elles le seront au bout de quelques années, et ensuite pour toujours : désormais simple matière à rire des époques passées et de leurs sottises.

Il y a en tout temps deux littératures, qui marchent d’une façon assez indépendante l’une à côté de l’autre : une littérature réelle et une littérature purement appa-

  1. « Leset fleissig die Alten, die wahren eigentlich Alten :
    Was die Neuen davon sagen, bedeutet nient viel ».