colporter en tout lieu triomphalement. Ce procédé louangeur est seulement le fait d’un dessein prémédité, de mercenaires qui escomptent des gages, de claqueurs payés, et d’agitateurs littéraires conjurés. Au contraire, la louange sincère, qui est avant tout le fruit d’un examen sérieux, porte un tout autre caractère. Elle a pour précurseur ce que Feuchtersleben a bien exprimé :
Comme pourtant les hommes luttent et résistent
— Simplement pour ne pas honorer le bon ![1].
Elle arrive très lentement et très tard, isolée et chichement mesurée, pesée par grammes et toujours entourée de restrictions, de sorte que celui qui la reçoit peut dire :
χείλεα μέν τ’ ἐδίην’, ὑπερῴην δ’ οὐκ ἐδίηνεν[2].
Et, cependant, celui qui la dispense ne s’en sépare qu’avec peine. Car c’est une récompense finalement arrachée, et de mauvaise volonté, par la grandeur des vrais mérites qu’il est impossible de dissimuler plus longtemps, à la médiocrité lourde, dédaigneuse, entêtée et envieuse ; c’est le laurier qui, comme chante Klopstock, était digne de la sueur des nobles âmes ; c’est, comme dit Gœthe, le fruit
De ce courage qui, tôt ou tard,
Triomphe de la résistance du sot monde[3].