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Page:Schopenhauer - Écrivains et Style, 1905, trad. Dietrich.djvu/87

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la ponctuation, pour faire tomber immédiatement le sens sous les yeux. C’est ce qui arrive en grec, en latin et en allemand.

Pour en revenir à la brièveté, à l’élégance et au relief du style, qui sont en cause ici, répétons que ces qualités ont seulement leur source dans la richesse et la valeur des pensées ; elles n’ont donc absolument rien à voir avec cette misérable castration de mots et de phrases destinée à raccourcir l’expression, que j’ai prise à partie comme il convient. En effet, des pensées solides et substantielles, par conséquent dignes d’être notées, doivent avoir assez d’étoffe et de contenu pour remplir si suffisamment les périodes qui les expriment, même dans la perfection grammaticale et lexicologique de toutes leurs parties, qu’elles n’apparaissent jamais creuses, vides ou légères ; mais le style reste partout bref et en relief, tandis que la pensée y trouve son expression saisissable et commode, et même s’y déploie et s’y meut avec grâce. Ce ne sont donc ni les mots ni les formes de la langue qu’il faut rétrécir ; ce sont les pensées qu’il faut élargir. C’est ainsi qu’un convalescent doit être en état de remplir ses vêtements comme auparavant, en recouvrant sa corpulence, et non en faisant rétrécir ceux-là.

La langue est une œuvre d’art et doit, comme telle, être traitée objectivement. Tout-ce qu’elle exprime doit être conforme aux règles et au but qu’on se propose, et ce que chaque phrase est destinée à dire doit être réellement montré comme y existant objectivement. Mais il ne faut pas traiter la langue seulement au point de vue subjectif et s’exprimer indigemment, en espérant que les autres sauront bien vous deviner. C’est ce que