Page:Schopenhauer - Écrivains et Style, 1905, trad. Dietrich.djvu/86

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poser aussi de la facilité de conception. On se comporte vis-à-vis des signes de ponctuation de l’imprimerie comme s’ils étaient en or. On omet environ les trois quarts des virgules nécessaires (s’y retrouve qui peut !) ; là où il faudrait un point, il n’y a qu’une virgule, ou tout au plus un point et virgule, etc. La première conséquence de ceci, c’est qu’on doit lire deux fois chaque période. Or, dans la ponctuation réside une partie de la logique de chaque période, celle-ci étant marquée par celle-là. Une négligence voulue, telle que celle en question, est donc absolument criminelle, surtout si, comme c’est aujourd’hui fréquemment le cas, elle est pratiquée même par des philologues jusque dans les éditions d’écrivains anciens, dont elle rend singulièrement plus difficile la compréhension. Le Nouveau Testament lui-même, dans ses éditions récentes, n’a pas été épargné. Mais si c’est à la brièveté que vous visez, grâce à la parcimonie des syllabes et au recensement des lettres, pour épargner du temps au lecteur, vous atteindrez beaucoup mieux votre but en laissant reconnaître aussitôt, par une ponctuation suffisante, quel est ce but, quels mots appartiennent à une période, et quels mots à une autre. Dans des langues comme le français, et même l’anglais, dont la grammaire, surtout très pauvre dans la faculté de flexion des mots, rend nécessaire un ordre sévèrement logique de ceux-ci, la ponctuation peut être également pauvre et lâchée. Mais là où une grammaire plus parfaite permet une construction de phrase artistique, au moyen de la transposition des mots dans leur ordre (ce qui produit de grands avantages rhétoriciens et poétiques), les mots non directement homogènes doivent être séparés par