Page:Schopenhauer - Éthique, Droit et Politique, 1909, trad. Dietrich.djvu/130

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selle, l’amour des hommes. Toute envie a disparu, et nous sommes heureux de constater, à sa place, chez ces hommes torturés, un léger adoucissement, une légère joie.

Il y a de même, au sujet de la méchanceté et de la perversion humaines, deux dispositions opposées.

Dans l’une, nous percevons directement la méchanceté chez les autres. De la naissent l’indignation, la haine et le mépris de l’humanité.

Dans l’autre, nous percevons indirectement la méchanceté chez nous-mêmes. De là naît l’humilité, et même la contrition.

Pour juger la valeur morale de l’homme, il est très important de savoir lesquelles de ces quatre dispositions prédominent en lui par couples (à savoir une de chaque division). Dans les très excellents caractères, c’est la seconde de la première division et la seconde de la suivante qui prédomineront.

De même que le corps humain le plus beau recèle dans son intérieur des ordures et des odeurs méphitiques, le plus noble caractère a des traits méchants, et le plus grand génie des traces de petitesse et de folie.

Toutes les règles générales sur l’homme et les prescriptions à son usage ne sont pas suffisantes, parce qu’elles partent de la fausse supposition d’une nature tout à fait ou à peu près semblable chez tous les hommes, point de vue qu’a même établi expressément la philosophie d’Helvétius. Or, la diversité originelle des individus sous le rapport intellectuel et moral, est incommensurable.