Page:Schopenhauer - Aphorismes sur la sagesse dans la vie, 1880, trad. Cantacuzène.djvu/35

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dans le mouvement. À l’intérieur de tout l’organisme règne un mouvement incessant et rapide : le cœur, dans son double mouvement si compliqué de systole et de diastole, bat impétueusement et infatigablement ; 28 pulsations lui suffisent pour envoyer la masse entière du sang dans le torrent de la grande et de la petite circulation ; le poumon pompe sans discontinuer comme une machine à vapeur ; les entrailles se contractent sans cesse d’un mouvement péristaltique ; toutes les glandes absorbent et sécrètent sans interruption ; le cerveau lui-même a un double mouvement pour chaque battement du cœur et pour chaque aspiration du poumon. Si, comme il arrive dans le genre de vie entièrement sédentaire de tant d’individus, le mouvement extérieur manque presque totalement, il en résulte une disproportion criante et pernicieuse entre le repos externe et le tumulte interne. Car ce perpétuel mouvement à l’intérieur demande même à être aidé quelque peu par celui de l’extérieur ; cet état disproportionné est analogue à celui où nous sommes tenus de ne rien laisser paraître au dehors pendant qu’une émotion quelconque nous, fait bouillonner intérieurement. Les arbres même, pour prospérer, ont besoin d’être agités par le vent. C’est là une règle absolue que l’on peut énoncer de la manière la plus concise en latin : Omnis motus, quo celerior, eo magis motus (Plus il est accéléré, plus tout mouvement est mouvement).

Pour bien nous rendre compte combien notre bonheur dépend d’une disposition gaie et celle-ci de l’état de santé, nous n’avons qu’à comparer l’impression que produisent