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DE LA PREMIÈRE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

deviennent de plus en plus ternes, que tous les objets sombres paraissent voilés du bleu physique (selon la très exacte théorie des couleurs par Gœthe), et que tous les contours s’effacent. Cette donnée est très faible en Italie, à cause de la grande transparence de l’air ; aussi y trompe-t-elle facilement : par exemple, vu de Frascati, Tivoli nous paraît être très près. Par contre, le brouillard, qui produit l’exagération anomale de cette donnée, nous fait voir les objets plus grands, parce que l’entendement les juge plus éloignés.

Enfin il nous reste encore, pour apprécier la distance, la connaissance intuitive que nous avons de la grandeur des objets interposés, tels que champs, fleuves, forêts, etc. Cette donnée n’est praticable qu’à la condition d’une succession non interrompue ; par conséquent, elle ne s’applique qu’aux objets terrestres et non aux objets célestes. En général, nous sommes plus exercés à nous en servir dans la direction horizontale que dans la verticale ; ainsi une boule, au sommet d’une tour de 200 pieds de hauteur, nous paraîtra beaucoup plus petite que placée sur le sol à 200 pieds devant nous, parce que dans le second cas nous tenons plus exactement compte de la distance. Toutes les fois que nous voyons des hommes dans des conditions telles que tout ce qui est situé entre eux et nous soit en grande partie caché, ils nous paraissent étonnamment petits.

C’est en partie à ce dernier mode d’évaluation, en tant qu’utilement applicable aux seuls objets terrestres et dans la direction horizontale seulement, et en partie à celui