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LA MÉMOIRE

alors que nous prenons connaissance de quelque chose qui n’a de rapport avec aucune autre chose dans notre conscience ; mais, comme nous l’avons montré ci-dessus, pareille chose ne peut arriver, et c’est là l’origine du principe de la raison suffisante que nous avons expliqué en détail dans ledit chapitre. Toute image qui se présente soudainement à notre fantaisie, comme aussi tout jugement dont le principe ne l’a pas précédé, doivent avoir été évoqués par un acte de volition, qui a un motif, bien que celui-ci, parce qu’il est de petite importance, et l’acte de volition, parce que l’exécution en est si facile qu’elle est simultanée, ne soient souvent pas aperçus.

§ 45. — La mémoire.

La propriété que possède le sujet connaissant d’obéir d’autant plus facilement à la volonté, dans l’évocation des représentations, que ces représentations se sont plus souvent déjà présentées à lui, c’est-à-dire sa capacité d’exercice, voilà ce que l’on appelle la mémoire. On la décrit habituellement en disant que c’est un réservoir dans lequel nous emmagasinerions un approvisionnement d’idées toutes faites, que nous posséderions par conséquent constamment, mais sans en avoir toujours conscience ; mais je ne puis approuver cette manière de voir. La répétition volontaire d’idées qui nous ont déjà été présentes devient si facile par l’exercice que, à peine un anneau de la chaîne se présente-t-il, nous y rattachons