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PARERGA ET PARALIPOLENA

sine, de Malebranche, que nous voyons tout en Dieu[1].

Malebranche est donc le seul auteur de tout cet enchaînement d’idées, que Spinoza aussi bien que Leibnitz n’ont fait qu’utiliser en l’arrangeant à leur convenance. Leibnitz aurait même pu s’en dispenser, car il a déjà abandonné ce qui constitue le problème, à savoir le simple fait que le monde ne nous est donné immédiatement que comme représentation, pour lui substituer le dogme d’un monde du corps et d’un monde de l’esprit, sans aucune communication possible entre les deux ; vu qu’il joint la question de la relation entre la représentation et la chose en soi avec la question de la possibilité pour la volonté de faire mouvoir le corps, et qu’il les résout toutes deux à la fois par son harmonie préétablie (voy. Système nouveau de la nature, in Leibn. Opp. éd. Erdmann, p. 125 ; — Brucker, His. ph., tom. IV, P. II, p. 425). Déjà plusieurs de ses contemporains, Bayle entre autres, avaient fait clairement ressortir la monstrueuse absurdité de sa doctrine en exposant les conséquences qui en découlent. (Voyez, dans les petits écrits de Leibnitz, traduits par Huth, en 1740, la note à la p. 79 dans laquelle Leibnitz lui-même est obligé d’énoncer les conséquences révoltantes de son hypothèse.) Mais l’absurdité même de la doctrine

  1. Eth., p. II, prop. 7 : Ordo et connexio idearum idem est, ac ordo et connexio rerum. — P. V, prop. 1 : Prout cogitationes rerumque idæ concatenantur in Mente, ita corporis affectiones, seu reurum imagines ad amussim ordinantur et concatenantur in Corpore. — P. II, prop. 5 : Esse formale idearum Deum, quatenus tantum ut res cogitans consideratur, pro causa agnoscit, et non quatenus alio attributo explicatur. Hoc est, tam Dei attributorum, quam rerum singularium idæ non ipsa ideata, sive res perceptas pro causa efficiente agnoscunt ; sed ipsum Deum, quatenus est res cogitans.