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LA DOCTRINE DE L’IDÉAL ET DU RÉEL

sante et la substance étendue, Spinoza n’a pas encore résolu le problème ; tout au plus a-t-il rendu l’influence physique de nouveau admissible. Mais celle-ci ne peut pas non plus lever la difficulté : car la loi de causalité est incontestablement d’origine subjective ; mais si même, à l’inverse, elle prenait sa source dans l’expérience extérieure, elle appartiendrait précisément à ce qui est mis en question, savoir, au monde qui ne nous est donné que comme idéalité ; de sorte qu’en aucun cas elle ne saurait être le pont qui établit la communication entre l’objectif absolu et le subjectif, mais tout au plus le lien qui relie les phénomènes entre eux. (Voyez Le monde comme volonté et représentation, vol. II)

Pourtant, et afin de mieux expliquer l’identité dont nous faisions mention plus haut, entre l’étendue et sa représentation, Spinoza émet une opinion qui embrasse à la fois celle de Malebranche et celle de Leibnitz. Exactement comme dans Malebranche, nous voyons toutes les choses en Dieu : « rerum singularium ideae non ipsa ideata, sive res perceptas, pro causa agnoscunt, sed ipsum Deum, quatenus est res cogitans » (Eth. P. II, pr. 5) ; et ce Dieu est aussi en même temps ce qu’il y a de réel et d’actif dans les choses, tout comme dans Malebranche. Mais comme, par le nom de Dieu, Spinoza désigne l’univers, finalement rien n’est ainsi expliqué. Mais chez lui, tout comme chez Leibnitz, il existe encore un parallélisme parfait entre le monde étendu et le monde représenté : « ordo et connexio idearum idem est, ac ordo et connexio rerum » (P. II, pr. 7), et bien d’autres