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PARERGA ET PARALIPOLENA

ment à fond : c’est celui de mener les Allemands par le bout du nez. Il est vrai que cela n’est pas bien difficile. Ne voyons-nous pas les mauvaises farces avec lesquelles il a pu tenir en respect pendant trente ans le monde savant en Allemagne ? Que les professeurs de philosophie continuent de prendre ces trois sophistes au sérieux et soient gravement occupés à leur faire une place dans l’histoire de la philosophie, cela provient tout simplement de ce que cela appartient à leur gagne-pain (en français dans le texte), en ce qu’ils y trouvent matière à faire une exposition détaillée, par écrit ou de vive voix, de l’histoire de la prétendue philosophie « post-kantienne », dans laquelle les doctrines de ces sophistes sont rapportées tout au long et discutées sérieusement, pendant que raisonnablement on ne devrait même pas se soucier de tout ce que ces gens-là ont pu débiter, rien que pour paraître ; à moins toutefois de vouloir déclarer toutes les écrivailleries de Hegel pour drogues officinales et d’en approvisionner les pharmacies, afin qu’elles les vendent en guise de vomitif psychique ; et en effet les nausées qu’elles provoquent sont réellement spécifiques. Mais en voilà assez sur ces œuvres et sur leur auteur ; nous l’abandonnons à l’admiration de l’Académie des Sciences du Danemark, qui a reconnu en lui un summus philosophus à sa façon, et qui exige qu’on ait du respect pour lui ; on peut s’en assurer en lisant son jugement annexé, comme un souvenir éternel, à mon mémoire sur le Fondement de la morale[1] ; il méritait d’être

  1. Voyez pour le texte de ce jugement la traduction française de M. A. Burdeau, page 195. Paris, G. Baillière, 1879. (Le trad.)