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APPENDICE

soi, objectiveraient ; et la logique serait aussi la véritable métaphysique ; de sorte que nous n’aurions qu’à penser, ou à laisser agir les concepts, pour savoir comment le monde extérieur est constitué absolument. Ainsi donc, tous les rêves creux qui hanteraient une boîte crânienne seraient par là même réels et vrais. De plus, comme la maxime des philosophâtres de cette période était que « plus c’est insensé et plus c’est beau », cette première absurdité fut appuyée par cette seconde, que ce n’est pas nous qui pensons, mais que ce sont les notions générales, d’elles seules et sans notre participation, qui effectuent l’opération de la pensée ; cette opération prit alors le nom de « mouvement dialectique propre des concepts » et forma la révélation universelle in et extra naturam. Au fond de cette farce il s’en trouve une autre, fondée également sur un abus de mots et qui, bien que n’ayant jamais été nettement énoncée, y est cachée incontestablement. Schelling avait, avec Spinoza, intitulé le monde Dieu ; Hegel prit l’expression au pied de la lettre. Comme ce mot, au propre, indique un être personnifié, qui, entre autres qualités absolument incompatibles avec le monde, possède aussi celle de l’omniscience, celle-ci fut également attribuée au monde, dans lequel sa place tout naturellement indiquée ne pouvait être que sous le crâne stupide de l’homme tout individu n’a donc qu’à donner libre cours à ses pensées (mouvement dialectique propre) pour voir se révéler à lui tous les mystères du ciel et de la terre ; tout cela, bien entendu, d’après le parfait galimatias de la dialectique hégélienne. Il est un art que ce Hegel possédait réelle-