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essai sur le libre arbitre

de le modifier en quelque façon, qu’elle réagit par conséquent sur lui (à la suite de l’impulsion même qu’elle en reçoit) : et c’est dans cette réaction que consiste toute entière la volition[1]. Il ressort déjà de ceci que la volition ne saurait se produire sans motif ; car alors elle manquerait également de cause et de matière. Seulement on se demande si, dès que cet objet est présent à notre entendement, la volition doit ou non se produire nécessairement ; bien plus, si en présence d’un même motif, il pourrait se produire une volition différente, ou même diamétralement opposée ; ce qui revient à mettre en doute si la réaction dont nous avons parlé peut, dans des circonstances identiques, se produire ou ne se produire pas, affecter telle forme ou telle autre, ou même deux formes absolument contraires. En un mot, la volition est-elle provoquée nécessairement par le motif ? ou faut-il admettre que la volonté, au moment où nous prenons conscience du motif, conserve son entière liberté de vouloir[2] ou de ne pas vou-

  1. Le motif est moins la cause efficiente que la cause finale de l’action. C’est une particularité qui le distingue de la cause physique, et que Schopenhauer aurait dû marquer plus nettement. Peut-être qu’en approfondissant cette différence, on y trouverait un argument contre le déterminisme.
  2. Ce n’est pas la volonté qui veut, mais le moi qui se détermine. L’expression de Schopenhauer est au moins impropre. (V. plus bas p. 36.)