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essai sur le libre arbitre

quoi cette forme de la causalité est la plus facile à comprendre : de là cette tendance née au siècle dernier, encore subsistante en France, et qui plus récemment s’est révélée même en Allemagne, de ramener toute espèce de causalité à celle-là, et d’expliquer par des causes mécaniques tous les phénomènes physiques et chimiques, puis, en s’appuyant sur la connaissance de ceux-ci, d’expliquer mécaniquement jusqu’au phénomène de la vie[1]. Le corps qui donne une impulsion meut le corps immobile qui la reçoit, et il perd autant de force qu’il en communique ; en ce cas nous voyons immédiatement la cause se transformer en un effet de même nature : ils sont tous les deux parfaitement homogènes, exactement commensurables, et en même temps sensibles. Il en est ainsi dans tous les phénomènes purement mécaniques. Mais Ton trouvera que ce mode d’action se transforme de plus en plus à mesure que l’on remonte l’échelle des êtres, et que les différences indiquées plus haut tendent à s’accentuer.

    prochez cette conception de la liberté de celle qui est exposée à la p. 70, note 1.

  1. C’est l’iatro-physicisme. « Le mécanisme de Descartes et de Boerhaave subsiste encore, sinon à l’état de doctrine, du moins à l’état de tendance. Il y a aujourd’hui, et il y aura longtemps encore des physiciens convaincus qu’on peut ramener tous les phénomènes de la nature, même ces phénomènes si délicats et si compliqués de l’organisation, aux lois générales du mouvement. » (E. Saisset, Revue des Deux-Mondes, 15 août 1862.