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la pensée de schopenhauer

prendre, que c’est à son Vouloir qu’on a affaire, lequel se refuse à la vérité, et qu’il vous oppose à plaisir des équivoques, des chicanes, des sophismes, en se retranchant derrière une prétendue incapacité de son intelligence à entendre vos raisons. Il va de soi qu’on n’a aucune prise sur un pareil interlocuteur ; car employer contre le Vouloir des raisons et des preuves, c’est s’attaquer à un corps solide avec les reflets d’un miroir. De là aussi l’aphorisme usuel : stat pro ratione voluntas.


Sur l’identité de la personne.

Sur quoi repose l’identité de l’individu ? Ce n’est pas sur la matière du corps ; celle-ci, au bout de peu d’années, n’est plus la même. Ce n’est pas non plus sur la forme de ce corps ; celle-ci se modifie également dans son ensemble et dans toutes ses parties ; à une exception près : l’expression du regard. Aussi est-ce à cette expression que nous reconnaissons un être humain, même après de longues années. Ceci prouve que malgré tous les changements que le temps lui fait subir, il y a cependant quelque chose en lui qui demeure entièrement soustrait à l’action de ce temps, et à quoi précisément nous le reconnais-