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ii. de la nature

l’épreuve d’un danger subit, comme aussi pour affronter la lutte avec un ennemi.

L’intellect, simple instrument du Vouloir, diffère de lui comme le marteau diffère du forgeron. Aussi longtemps que dans un entretien l’intellect est seul à agir, cet entretien reste froid. C’est comme si l’homme lui-même n’y participait pas ; aussi ne risque-t-il pas réellement de s’y compromettre, mais tout au plus d’y trahir son infériorité. Il faut que le Vouloir entre en jeu pour que l’homme soit vraiment en cause ; c’est alors seulement que l’homme montre de la chaleur ; alors seulement il peut arriver que « ça chauffe ». C’est toujours au Vouloir qu’on attribue la chaleur de la vie ; par contre, on dit une lucidité froide, ou examiner une question froidement ; ce qui signifie penser sans subir l’influence du Vouloir. Essayer d’intervertir ce rapport, c’est-à-dire de considérer le Vouloir comme l’instrument de l’intellect, c’est faire du forgeron l’instrument du marteau.

Lorsqu’on dispute contre quelqu’un en usant d’explications et d’arguments et qu’on se donne toute la peine possible pour le convaincre, croyant avoir affaire à son seul intellect, rien n’est plus désagréable que de s’apercevoir finalement qu’il ne veut pas com-