Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/144

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
102
la pensée de schopenhauer

continuellement ; le nouveau-né dort la plus grande partie de son temps.

D’une façon générale, le phénomène du sommeil confirme excellemment cette vérité, que tout ce qui est conscience, perception, connaissance, pensée n’est pas en nous un fait originel, mais bien un état secondaire et conditionné. C’est une dépense spéciale à laquelle est contrainte la nature ; c’est même sa dépense suprême, à laquelle elle peut d’autant moins se livrer sans interruption, qu’elle lui fait rendre de plus grands effets. La connaissance est le produit, l’efflorescence du système nerveux cérébral, lequel est nourri lui-même, à la façon d’un parasite, par le reste de l’organisme.

Dans le somnambulisme magnétique, la conscience se dédouble : deux séries de représentations se produisent, dont chacune est cohérente en elle-même, mais totalement distincte de l’autre ; la conscience de l’état de veille ne sait rien de la conscience somnambulique. Mais dans toutes deux le Vouloir conserve le même caractère el demeure parfaitement identique ; il manifeste dans toutes deux les mêmes penchants et les mêmes répugnances. Car la fonction est susceptible de se dédoubler, mais non pas l’être en soi.