d’exemplaires de telle ou telle espèce, là où jusqu’alors elle n’en fournissait qu’un seul, montrant ainsi que les millions ne lui reviennent pas plus cher que l’unité ; nous en viendrons, ici encore, à nous rendre compte que la multiplicité des choses a son origine dans le mode de connaissance du sujet ; qu’elle est étrangère à la « chose en soi », c’est-à-dire à la force intérieure primordiale qui s’affirme sous l’apparence du multiple ; que par conséquent le temps et l’espace, qui seuls rendent possible toute multiplicité, ne sont que des formes de notre perception ; mieux encore, que cette incroyable ingéniosité de structure, appliquée à des œuvres que la nature prodigue et sacrifie en même temps avec la plus cruelle indifférence, n’a au fond sa source que dans la façon dont nous-mêmes concevons les choses : en ce sens que l’impulsion fondamentale, une et indivisible, du Vouloir comme « chose en soi », dès qu’elle figure en tant qu’objet dans les cadres de notre perception cérébrale, doit y revêtir l’aspect d’un enchaînement compliqué et perfectionné de parties distinctes, combinées, de telle façon qu’elles se servent réciproquement de but et de moyen, en un organisme d’une inépuisable perfection.
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la pensée de schopenhauer