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ii. de la nature

Enfin, tout au haut de l’échelle, là où le Vouloir atteint le degré suprême de son objectivation, cette faculté cognitive de l’intellect éclose chez l’animal, laquelle reçoit des sens ses données et d’où résulte la perception pure, liée au moment présent, devient elle-même insuffisante. A l’être complexe, aux multiples faces et susceptible de multiples formes, en proie à mille besoins autant qu’en butte à milles atteintes, l’homme, il fallait, pour qu’il pût subsister, la lumière d’une double connaissance ; il fallait, en quelque sorte, en plus de la connaissance sensible, une élévation de celle-ci à la seconde puissance, ou, si l’on veut, une seconde connaissance, « réfléchie » par la première : la raison, faculté de conception abstraite. Avec elle apparaît la réflexion consciente, impliquant la faculté d’embrasser du regard le passé et l’avenir, et par suite celle de délibérer, de s’inquiéter, de préméditer, d’agir autrement que sous l’influence du présent, et enfin aussi de prendre nettement conscience des décisions de son propre Vouloir.