Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/188

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
146
la pensée de schopenhauer

Elle ne fait que fournir l’occasion de se manifester à ce Vouloir un et indivisible qui est l’essence même de toutes choses et dont l’objectivation, échelonnée en une hiérarchie, constitue la totalité de notre monde sensible. Seule l’apparition du phénomène, son entrée dans le visible en tel lieu et en tel temps, est amenée par la cause et, en ce sens, dépendante d’elle ; mais non pas l’ensemble du phénomène et son essence intime, qui est le Vouloir même, sans raison parce qu’irréductible au principe de raison. Il n’y a point de chose dans le monde dont l’existence, purement en tant qu’existence, ait une cause ; il n’y a jamais qu’une cause en vertu de laquelle telle chose est précisément ici et précisément maintenant. Le fait qu’une pierre présente ici de la pesanteur, là de la rigidité, dans tel cas des propriétés électriques, dans tel autre des propriétés chimiques, dépend de causes, d’influences extérieures qui permettent de l’expliquer ; mais ces propriétés elles-mêmes, c’est-à-dire tout l’être de cette pierre qu’elles constituent et qui, par suite, nous apparaît de toutes les façons qu’on vient de dire ; en d’autres termes, le fait que cette pierre soit ce qu’elle est, et qu’en principe elle existe : cela n’a pas de raison, car c’est l’apparition dans le visible du Vouloir soustrait