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la pensée de schopenhauer
De la finalité.

L’étonnement et l’admiration où nous plonge l’adaptation absolument parfaite des moyens aux fins dans la structure des êtres organisés, reposent sur une conception qui s’explique, il est vrai, fort naturellement, mais qui n’en est pas moins fausse. Nous supposons, en effet, à tort que la concordance des parties, aussi bien entre elles que par rapport à l’ensemble de l’organisme et à ses fins dans le monde extérieur, parce que nous la discernons et l’apprécions par le moyen de la connaissance, c’est-à-dire par la voie de la représentation, a été également introduite dans l’organisme par cette même voie ; autrement dit, que ce qui existe pour un intellect doit aussi avoir été exécuté par un intellect. Nous-mêmes, cela va sans dire, sommes incapables de rien exécuter qui présente cette régularité et cette stricte conformité à une loi — qu’on voit par exemple dans tous les cristaux — sans obéir aussi à une règle et à une loi, ni rien qui soit adapté à un but, sans être aussi guidés par la notion de but. Mais ceci ne nous autorise nullement à attribuer cette capacité bornée de notre action à l’action de la nature, laquelle est antérieure à tout intellect ; outre que son mode d’action, comme nous l’avons vu ailleurs, diffère