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ii. de la nature

aussi nulle lacune, aucun élément contradictoire ou insuffisant, ou qui ne soit, en son genre, parfait ; tout ce qui est nécessaire doit s’y trouver dans la mesure exacte de sa nécessité, ni plus ni moins. Car ici le maître, l’œuvre et les matériaux de l’œuvre sont une seule et même chose ; c’est ce qui fait que l’organisme apparaît comme un chef-d’œuvre d’une inépuisable perfection. Le Vouloir qui l’a créé n’a pas d’abord conçu l’intention et reconnu le but, puis conformé les moyens au but en maîtrisant la matière ; mais l’acte de ce Vouloir est immédiatement aussi le but et immédiatement aussi l’accomplissement. Il n’avait donc pas à contraindre tout d’abord de se plier à son dessein des moyens étrangers à lui-même, car ici vouloir, agir et atteindre le but ne font qu’un. C’est pourquoi tout organisme s’offre à nous comme un miracle, à quoi ne se peut comparer aucune œuvre humaine artificiellement élaborée à la lumière de la connaissance. Toute forme animale nous présente l’aspect d’une totalité, d’une parfaite unité, d’une stricte harmonie de toutes les parties, qui tient si fortement et si entièrement à la présence d’une seule idée fondamentale, qu’à la vue de l’animal le plus hétéroclite, pour