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iv. de la vie et de la mort

tion — il n’y a également qu’une différence de degré. Or, puisqu’il nous suffit à chaque moment de notre vie de conserver notre forme et que nous ne songeons pas à regretter la matière que nous éliminons, pourquoi ne pas observer la même attitude en face de la mort, qui vient seulement faire en plus grand et achever en une fois sur notre corps ce qui déjà s’y accomplissait en détail chaque jour et à toute heure ? Indifférents à l’un de ces phénomènes, pourquoi tremblerions-nous devant l’autre ? Si l’on adopte ce point de vue, il paraîtra aussi dénué de sens de réclamer la survivance d’une individualité qui sera remplacée par d’autres, que de souhaiter la persistance d’une matière corporelle qui, en fait, ne cesse de se renouveler ; il paraîtra aussi absurde d’embaumer des cadavres qu’il le serait de conserver soigneusement ses excréments. Et quant à la conscience individuelle qui est liée au corps individuel, n’oublions pas qu’elle est interrompue chaque jour par le sommeil. Or la mort est un sommeil dans lequel l’individualité est oubliée ; tout le reste se réveillera, ou plutôt ne s’est pas endormi.

Il importe avant tout de bien comprendre que la seule forme des manifestations du Vouloir, c’est-à-dire