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la pensée de schopenhauer

ginairement aveugle qui ne saurait aboutir à mieux qu’à prendre conscience de lui-même à seule fin de se supprimer, il faut aussi que l’acte indispensable à la propagation de cette existence présente l’aspect qu’il présente en réalité.

Etant l’expression la plus distincte du Vouloir, l’acte sexuel est aussi le substratum, le résumé, la quintessence de l’Univers. Par lui nous voyons clair sur la nature des choses et sur le train de ce monde : il est le mot de l’énigme. Aussi est-ce de lui qu’il s’agit quand on parle de l’« Arbre de la connaissance », dont quiconque a goûté le fruit a senti ses yeux s’ouvrir sur la vie. Comme dit Byron :

The tree of knowledge has been pluck’d, — all’s known.

(D. Juan. I. 128.)

De là encore ce caractère particulier que présente l’acte sexuel d’être le grand άρρητον, le secret que personne n’ignore, la chose qu’il n’est pas permis de jamais mentionner expressément, mais qui s’entend si bien d’elle-même et qui est si bien présente à la pensée de chacun, comme la chose essentielle, qu’il suffit d’y faire la plus légère allusion pour être instantanément compris. Au reste, si tout ce qui y touche joue dans l’existence ce rôle capital, qui veut