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iv. de la vie et de la mort

rable au non-être, et qu’on peut même se demander si l’expérience et la réflexion, mises en mesure de se prononcer, ne décideraient pas en faveur de ce dernier. Si l’on frappait aux portes des tombeaux et qu’on demandât aux morts s’ils veulent ressusciter, ils secoueraient négativement la tête.


La nature et la mort.

Plaçons-nous maintenant à un autre point de vue, et voyons un peu comment, en opposition aux individus, l’ensemble de la nature se comporte à l’égard de la mort. Ce faisant, nous ne quittons pas le terrain empirique.

Pour nous, évidemment, là où il y va de la vie ou de la mort, c’est notre bien suprême qui est en jeu ; nous prêtons à tout ce qui décide de l’une ou de l’autre un intérêt passionné, fait d’effroi et d’attention haletante ; tout être, à nos yeux, joue là son va-tout. La nature, par contre, qui pourtant ne ment jamais, mais qui se montre toujours ingénue et loyale, nous déclare qu’elle en juge tout autrement ; elle s’exprime sur ce point comme Krishna dans le Bhagavad-Gita, car elle nous dit : peu importe la vie ou la mort de l’individu. N’est-ce point là, en effet, ce qu’elle veut dire, quand elle nous montre la vie de