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v. morale et religion

esprits cultivés, mais peu capables d’aller au fond des choses, ont en vue quand ils parlent du libre arbitre, ce libre arbitre qui fait selon eux la supériorité évidente de l’homme sur l’animal.

Or le motif abstrait, celui qui consiste en une simple idée, est une cause extérieure et déterminante pour le Vouloir exactement au même titre que le motif concret représenté par un objet réel et actuel. Autrement dit, il est une cause comme une autre ; et il est même, aussi bien que les autres causes, quelque chose de matériellement réel, en ce sens qu’il se ramène toujours en dernière analyse à une impression reçue quelque part et à un moment quelconque du dehors. Ce qui le distingue de la cause matérielle proprement dite, c’est uniquement la longueur du fil conducteur qui relie ici la cause à son effet. Il faut donc s’en tenir à une vue des choses bien superficielle pour confondre cette liberté relative, de simple comparaison, avec une liberté absolue, un « libre arbitre d’indifférence ». La faculté de délibérer, qu’implique cette liberté relative, n’engendre en réalité rien d’autre qu’un conflit des motifs, souvent fort pénible, par où se trahit ce que nous appelons l’indécision, et qui a pour théâtre l’ensemble de la conscience de l’individu. Celui-ci laisse