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la pensée de schopenhauer

de lui-même, que son Univers, en un mot, doit périr avec la mort ; et c’est pourquoi la mort équivaut pour lui à la fin du monde. Tels sont les éléments dont se forme l’égoïsme, sur la base du Vouloir-vivre, cet égoïsme qui, normalement, sépare toujours l’homme de son prochain comme par un fossé profond. S’il arrive qu’un être humain réussisse réellement à franchir ce fossé pour se porter au secours d’un autre, la chose fait l’effet d’un miracle qui excite l’étonnement et l’admiration,


Sur les mobiles moraux. Morale et intellect.

Une fois qu’on a passé en revue les divers instincts anti-moraux auxquels obéit la nature humaine, on constate à quel point il est malaisé de découvrir chez l’homme un mobile assez puissant pour le faire agir contrairement à ses penchants les plus enracinés, ou qui — à supposer que l’expérience nous offre réellement des exemples de cette façon d’agir — nous en puisse fournir une explication qui ne soit ni insuffisante ni artificielle. C’est même là un problème si difficile que, pour lui trouver une solution à l’usage du grand nombre, on s’est vu partout obligé de recourir à l’appareil d’un monde