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la pensée de schopenhauer
Le christianisme et les animaux.

Un vice radical du christianisme qu’il y a lieu de relever ici, et dont toutes les explications de ses apologètes n’arriveront pas à le disculper, vu qu’on en peut constater tous les jours les funestes effets, c’est qu’il a détaché artificiellement l’homme du monde animal auquel il appartient par nature, et qu’il n’accorde d’importance, voire même de réelle existence qu’à l’homme seul, considérant les animaux comme de simples choses. Le brahmanisme et le bouddhisme, au contraire, ont su demeurer ici dans la vérité ; ils ont su reconnaître l’évidence et discerné sans hésiter la communauté d’essence par où l’homme se rattache d’une façon générale à l’ensemble de la nature et tout particulièrement à la nature animale. Que ce soit dans leur doctrine de la métempsycose ou ailleurs, toujours ils nous montrent l’homme en relation étroite avec le monde des animaux. Aussi accoutumés que nous puissions être en Europe à l’absurdité de la conception chrétienne, cette place importante que le brahmanisme et le bouddhisme font partout à l’animal, comparée au rôle absolument nul que celui-ci joue dans le judéo-christianisme, suffit à décider, s’il s’agit d’apprécier la perfection relative de ces trois religions, de l’infériorité de la dernière.