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la pensée de schopenhauer

Toutes les fois qu’on a affaire à un déiste, il faut lui proposer ce dilemme : « ton Dieu est-il ou n’est-il pas un individu ? » S’il répond non, c’est que son Dieu n’est pas un Dieu ; s’il répond oui, il en résulte des choses bizarres.


Du mysticisme.

Les « quiétistes » et les mystiques ne sont pas les adhérents d’un certain dogme adopté à un moment donné en vertu de préférences d’ordre théorique, dogme qu’ils s’occuperaient de défendre et de propager, et qui ainsi les unirait tous les uns aux autres comme les membres d’une secte.

L’expérience intérieure qui parle par la bouche des mystiques, ou dont, tout au moins, ils s’accordent tous à nous parler, est de nature telle qu’il nous est impossible, à nous autres, de la faire à notre tour et par conséquent de la vérifier. Elle est le partage exclusif d’un petit nombre de privilégiés, et comme telle on a pu l’appeler un effet de la grâce. C’est là d’ailleurs ce qui nous fait douter de sa réalité. Et pourtant, si nous voyions surgir aux époques de l’histoire et dans les parties du monde les plus diverses, certains hommes très différents eux-mêmes par la race, par l’âge, par la condition, qui tous viendraient parler d’un certain pays qu’ils auraient