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la pensée de schopenhauer

liques, ainsi, dans les temples, par l’obscurité et le silence. Le brahmanisme va même ici jusqu’à exiger du fidèle qu’il suspende en lui tout mouvement de la pensée et de la perception sensible, afin d’atteindre, en prononçant sans cesse mentalement le mot mystérieux, Oum, à une totale absorption de l’être dans les profondeurs du moi. — À prendre le terme dans son sens le plus général, il y a mysticisme partout où l’homme se trouve amené à éprouver intérieurement et directement ce à quoi ne saurait atteindre ni aucune perception extérieure ni aucune notion, en un mot aucune sorte de connaissance. Le mystique s’oppose au philosophe en ce sens qu’il prend son point de départ au dedans, alors que l’autre le prend au dehors. Il part en effet d’une expérience individuelle et intérieure positive, qui lui fera dire, par exemple, qu’il se perçoit lui-même comme l’Être un, absolu et éternel. Mais, de cette expérience, rien n’est communicable, sinon précisément des affirmations que nous sommes réduits à admettre sur parole, et c’est pourquoi le mystique ne saurait persuader notre raison. Le philosophe, au contraire, part de ce qui nous est commun à tous, à savoir des phénomènes objectivement et universellement donnés et des faits de conscience qui se produisent dans