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vi. fragments divers

trait que réside la secrète et mystérieuse direction de toutes les choses humaines.

C’est grâce à l’analogie de certains faits de la réalité avec nos rêves qu’il nous est permis d’entrevoir, toujours, il est vrai, dans un lointain nébuleux, comment il se pourrait que la puissance cachée qui gouverne selon les fins qu’elle nous assigne les événements de notre vie n’eût pas sa source ailleurs que dans les profondeurs inexplorées de notre propre être. Les événements qui se passent dans nos rêves et y déterminent nos actes s’y produisent en effet, comme dans la réalité, d’une façon purement fortuite, en tant que faits extérieurs indépendants de nous et souvent directement contraires à nos désirs. Et pourtant il n’y en a pas moins entre eux un lien secret, ils n’en présentent pas moins une certaine conformité à un même dessein, qui veut qu’eux aussi se trouvent réglés et ajustés — et cela de telle sorte qu’ils se rapportent uniquement à nous-mêmes — par une puissance secrète à laquelle obéissent tous les hasards de nos songes. Or ce qu’il y a de plus étrange, c’est qu’en fin de compte cette puissance ne saurait être autre chose que notre propre Vouloir, mais opérant ici dans une sphère où n’atteint pas