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i. de la connaissance

intellect est comparable à une banque d’émission qui, pour être solidement assise, doit avoir du numéraire en caisse, de façon à pouvoir rembourser en cas de besoin tous les billets qu’elle a émis ; les perceptions sont le numéraire, les concepts sont les billets. — En ce sens, il est très juste d’appeler les perceptions représentations primaires, et les concepts représentations secondaires.

N’avoir sur une chose que des notions abstraites, sans intuition de cette chose, n’en fournit qu’une connaissance toute générale. On ne connaît les choses et leurs rapports réellement et à fond que dans la mesure où on est en état de se les représenter entièrement sous forme de perceptions distinctes et sans l’aide des mots. Expliquer des mots par des mots, comparer des concepts avec des concepts, ce qui est l’occupation de la plupart des philosophes, n’est en réalité qu’un jeu, qui consiste à déplacer en tous sens les sphères de concept, pour voir si elles entrent ou n’entrent pas les unes dans les autres. Tout au plus arrivera-t-on par là à des conclusions ; mais les conclusions, elles non plus, n’apportent pas de connaissance réellement neuve ; elles font voir seulement tout ce qui était contenu dans une notion déjà existante et les