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CHAPITRE XX[1]
OBJECTIVATION DE LA VOLONTÉ DANS L’ORGANISME ANIMAL

Par objectivation j’entends l’action de se représenter dans le monde réel des corps. Toutefois cette objectivation, comme je l’ai expressément démontré dans le premier livre et les suppléments que j’y ai ajoutés, est entièrement déterminée par le sujet connaissant, c’est-à-dire par l’intellect ; en tant qu’objectivation, et en dehors de la connaissance que nous en avons, elle est donc absolument impensable, puisqu’elle n’est avant tout qu’une représentation intuitive, et comme telle un phénomène cérébral. Supprimez ce phénomène, il restera la chose en soi. Le second livre a pour but de faire voir que cette chose en soi est la volonté, et il s’occupe tout d’abord de le démontrer par l’étude de l’organisme humain et animal.

La connaissance du monde extérieur peut aussi être désignée sous le nom de « conscience d’autre chose », par opposition à la « conscience de nous-mêmes ». Nous avons trouvé que le véritable objet, que la matière de cette dernière est la volonté ; c’est pour aboutir à la même conclusion, que nous allons considérer maintenant la conscience d’autre chose, c’est-à-dire la connaissance objective.

Sur ce point, ma thèse est la suivante : Ce qui dans la conscience de nous-mêmes, c’est-à-dire subjectivement, se présente sous la forme de l’intellect, dans la conscience d’autre chose, c’est-à-dire objectivement, prend la forme du cerveau ; ce qui, dans la conscience de nous-mêmes, c’est-à-dire subjectivement, prend la forme de la volonté, dans la conscience d’autre chose, c’est-à-dire objectivement, prend la forme de l’organisme dans son ensemble.

Aux démonstrations que j’ai données de cette proposition, tant dans notre second livre que dans les deux premiers chapitres du traité sur la Volonté dans la nature, je vais ajouter les éclaircissements complémentaires suivants.

La plupart des faits sur lesquels se fonde la première partie de cette thèse ont été donnés dans le chapitre précédent. J’y ai montré par la nécessité du sommeil, par les modifications qu’entraîne

  1. Ce chapitre se rapporte au § 20 du premier volume.