en question, mais elle se manifeste aussi pleinement des qu’ils viennent a parler du sys-teme de Kant et affectent d’en savoir quelque chose. Les bras vous tombent alors de voir des (Yens vivant de la philosophie ne pas connaître réellement la doctrine la plus importante qui se soit produite depuis deux mille ans, et qui leur est presque contemporaine. Oui, cela va si loin qu’ils citent faussement les titres des écrits de Kant, font dire a l’occasion a celui-ci tout le contraire de ce qu’il a dit, mutilent jusqu’au non-sens ses termes techniques, et les emploient sans se douter en rien de leur signification véritable.
Car, vraiment, s’initier a la doctrine de ce pro-fond esprit en feuilletant a la hâte ses ceuvres, comme se le permettent seuls ces polygraphes et ces gens d’affaires philosophiques qui pensent d’ailleurs en avoir « fini » depuis longtemps avec tout cela, la chose ne va pas, et c’est une impudence ridicule. Reinhold’, le premier apôtre de Kant, n’a-t-il pas raconté qu’il dut étudier laborieusement cinq fois la Critique de la raison pure pour en pénétrer enfin le sens ?
A l’aide des exposés de gens de cet acabit, le bon public, que l’on mene par le nez, s’imagine ensuite pouvoir s’assimiler en un temps tres court et sans aucune peine la philosophie de Kant ! C’est la chose absolument impossible. On ne parviendra jamais a se faire, sans une étude personnelle laborieuse et réitérée des principales eeuvres de Kant, la moindre idée de ce systeme philosophique, le plus important qui ait jamais
I. Karl-Leonhard Reinhold, né a Vienne en 1758, mort a Kiel en 1823. II vécut dans la société littéraire de Wei-mar et épousa la fille de Wieland. Ses nombreux ouvrages sont un assez fidele miroir des variations philosophiques de la pensée allemande depuis Kant, iusqu’a Schelling. S’il s’y révele une maniere de voir, un peu personnelle, c’est son admiration pour Kant. (N.d.T.)