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Page:Schopenhauer - Sur la religion, 1906.djvu/156

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plus que la moindre circonstance défavorable l’empêche d’aboutir. On sent par là que, après un acte accompli ou ultérieurement entravé, ce quelque chose peut de même se séparer de la matière, en restant intact ; un fait qui indique une tout autre permanence que la persistance de la matière dans le temps.

Si nous nous imaginons un être connaissant, comprenant et voyant tout, la question de notre persistance après la mort n’aurait sans doute aucun sens pour lui, parce qu’au delà de notre existence actuelle, temporelle et individuelle, persistance et cessation n’auraient plus de sens et seraient des idées impossibles à distinguer. En conséquence, ni l’idée de destruction ni celle de persistance ne trouveraient leur application à notre être réel et vrai ou à la chose en soi se représentant dans notre phénomène, vu que ceux-ci sont empruntés au temps, qui est seulement la forme du phénomène[1]. En attendant, nous pouvons nous imaginer l’indestructibilité de ce noyau de notre phénomène comme une simple continuation de celui-ci, et, il faut l’ajouter, conformément au schéma de la matière, qui, à travers toutes les modifications de ses formes, se maintient dans le temps. Mais si nous refusons à celui-ci cette continuation, nous regardons notre fin temporelle comme un anéantissement, d’après le schéma de la forme, qui disparaît quand la matière qui la porte lui fait défaut. Tous deux sont néanmoins une μετάβασις εἰς

  1. Grâce à la forme de la connaissance du temps, l’homme (c’est-à-dire l’affirmation de la volonté de vivre à son plus haut degré d’objectivation) se fait l’idée de constituer une espèce d’être qui naît et meurt toujours de nouveau.