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Page:Schopenhauer - Sur la religion, 1906.djvu/178

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beatam. Celle-ci, au contraire, de provoquer la délivrance et l’affranchissement de la vie en général, comme l’indique dès la première phrase la Samkhya Karika.

On se trouve en présence d’un contraste analogue, renforcé encore par le sens de la vue, lorsqu’on regarde le beau sarcophage antique de la galerie de Florence. Ses reliefs représentent toute la série des cérémonies d’une noce, depuis la demande en mariage jusqu’au moment où la torche d’Hymen brille auprès du lit nuptial. Maintenant imaginez-vous, à côté, le cercueil chrétien, tendu de noir, en signe de deuil, avec le crucifix au-dessus. Le contraste est des plus significatifs. Tous deux veulent consoler au sujet de la mort, tous deux d’une façon opposée, et tous deux ont raison. L’un signifie l’affirmation de la volonté de vivre, ce que reste en réalité tout le temps la vie, si rapidement que ses formes puissent changer. L’autre indique, par les symboles de la souffrance et de la mort, la négation de la volonté de vivre et l’affranchissement d’un monde où règnent la mort et le diable. Entre l’esprit du paganisme gréco-romain et l’esprit du christianisme, le véritable contraste est celui de l’affirmation et de la négation de la volonté de vivre ; et sur ce dernier point, c’est le christianisme qui a raison.

Ma philosophie est à l’éthique de toutes les philosophies européennes ce qu’est le Nouveau Testament à l’Ancien, conformément à la conception ecclésiastique de ce rapport. L’Ancien Testament place l’homme sous la domination de la loi, qui néanmoins ne mène pas à l’affranchissement. Le Nouveau Testament, au contraire, déclare la loi insuffisante, et même brise avec